The Specificity of Lebanon

Soraya HAMDAN | 30/11/2012


De gauche à droite : Mohammad Choucair, Adnane Kassar, Nagib Mikati, Raouf Abou Zaki et Nabil Itani. Photo Dalati et Nohra
De gauche à droite : Mohammad Choucair, Adnane Kassar, Nagib Mikati, Raouf Abou Zaki et Nabil Itani. Photo Dalati et Nohra


LIBAN – ÉVÉNEMENT Si l’économie libanaise a souvent réussi à échapper aux crises qu’elles soient politiques, économiques ou sécuritaires, 2012 semble être une année charnière. En effet, le pays a toujours pu compter sur un système financier solide, des transferts d’émigrés importants et surtout sur des pays que l’on nomme « les amis du Liban ». Mais cette année, les ressortissants arabes ont déserté le pays dans un contexte économique déjà désastreux. Comment 2013 se profile-t-elle ?



Le deuxième Forum économique libanais organisé par le groupe al-Iktissad wal Amal, en coopération avec IDAL et l’Union libanaise des Chambres de commerce, a été inauguré hier à Beyrouth en présence du Premier ministre Nagib Mikati. Parmi les intervenants figuraient notamment le président des organismes économiques Adnane Kassar, le président d’IDAL Nabil Itani, le directeur général d’al-Iktissad wal Amal, Raouf Abou Zaki, et le président de la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture de Beyrouth et du Mont-Liban (CCIAB), Mohammad Choucair.


 


L’événement a été l’occasion pour les intervenants de revenir sur les défis économiques de 2012 et sur les perspectives de croissance pour l’année à venir. Dans son discours, le Premier ministre a reconnu l’impact négatif des événements politiques sur l’économie libanaise tout en rappelant que cette dernière était capable de résister aux chocs. « Malgré le recul des indicateurs, la situation reste relativement encourageante par rapport à celle d’autres pays de la région ou même de certains pays européens », a-t-il déclaré. « Les piliers de l’économie demeurent forts même si les difficultés du tourisme et de l’immobilier sont bien réelles, rien n’est irréversible », a-t-il conclu. De son côté, Adnane Kassar s’est montré beaucoup moins optimiste accusant la politique interne « d’handicaper l’économie du pays ». Il a indiqué s’attendre à un déficit de la balance des paiements à hauteur de plus d’un milliard de dollars fin 2012. Le ministre de l’Industrie Vrej Saboujian, lui, a indiqué que les derniers chiffres concernant les exportations industrielles étaient encourageants et pouvaient laisser espérer une amélioration économique. « Il faut cependant redoubler d’efforts et d’ingénuité dans un contexte de compétitivité mondiale accrue, a-t-il insisté. Il faut ainsi se tourner vers l’innovation, la flexibilité et la diversification pour s’adapter aux marchés. »





Azour à « L’OLJ » : Le Liban sans gouvernail, alors qu’il a les moyens de gérer ses défis
Interviewé par L’Orient-Le Jour, Jihad Azour, ancien ministre des Finances, a déclaré que « si 2012 a bel et bien été une année difficile, c’est 2013 qui constituera l’année charnière au vu des développements régionaux et de l’agenda politique particulièrement chargé ». L’ancien ministre a particulièrement insisté sur l’urgence de maîtriser les dépenses budgétaires. « Après deux ans particulièrement difficiles, on ne peut plus se permettre de reculer, a-t-il déclaré. L’économie libanaise et l’enjeu de la stabilité ne peuvent plus supporter davantage de dépenses sans un cadre gouvernemental adéquat. » Pour Jihad Azour, le contrôle des finances publiques est lésé au second plan, alors que l’enjeu est fondamental. « Les dépenses pour 2013 risquent de continuer à grimper si la nouvelle grille des salaires est approuvée sans que le gouvernement ne puisse expliquer son financement, tandis que la facture pétrolière continue à augmenter. Le pays a pourtant les moyens de relever les défis, mais il n’y parviendra pas sans personne au gouvernail. »

Mohammad Choucair : Les touristes arabes sont notre seul pétrole
Plus pessimiste, Mohammad Choucair a déclaré dans un entretien accordé à L’Orient-Le Jour « qu’il s’agissait de la pire période économique que le pays n’aie jamais connu ». « Tous les moteurs de croissance ont énormément souffert cette année et le secteur privé ne pourra pas continuer longtemps à soutenir le secteur public », a-t-il confié. Le président de la CCIAB a en outre insisté sur l’importance des ressortissants arabes qui représentent près de 65 % des touristes au Liban pour l’économie du pays. Rappelons que cet été cinq monarchies arabes du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis et Koweït) avaient appelé leurs ressortissants à ne plus se rendre au Liban en raison de l’instabilité sécuritaire. « Sans les touristes arabes, le Liban ne pourra pas résister à cette crise gravissime, a ainsi confié Mohammad Choucair à L’Orient-Le Jour. Si un changement de gouvernement ne survient pas, 2013 sera sans doute pire que cette année. Les touristes arabes sont notre seul pétrole, a-t-il poursuivi. Il faut coûte que coûte les faire revenir. »

 


(Pour mémoire : Liban : Le FMI prévoit un PIB à 41,8 milliards de dollars pour 2012)


De son côté, Fouad Zmokhol, le président du Rassemblement des chefs d’entreprise au Liban (RDCL), s’est montré plus optimiste. « Si la réalité économique montre effectivement que les chiffres ne sont pas bons, je pense que le Liban a les moyens de relever les défis politiques, sécuritaires, sociaux et même celui de la récession », a-t-il indiqué à L’Orient-Le Jour. Fouad Zmokhol a ainsi déclaré que des « solutions existent bien, pour la survie du pays sur le court terme ». Selon lui, en temps de crise, il ne faut plus se contenter de politiques sur le long terme mais se diriger vers des solutions rapides à mettre en place urgemment. « L’économie a besoin d’oxygène, a-t-il indiqué. Des remèdes existent sur le court terme pour apporter un nouveau souffle à notre économie. Pour commencer il ne faut plus compter uniquement sur les touristes arabes, mais déployer des efforts pour reconquérir les Libanais de la diaspora. »


 


(Pour mémoire : Diaspora : quand le rêve libanais se vit ailleurs)


 


C’est ainsi la première solution confiée par Fouad Zmokhol à L’Orient-Le Jour, un « remède simple et peu coûteux qui peut engendrer rapidement de nombreux profits ». Son idée : nouer un partenariat avec la Middle East afin d’offrir des tarifs préférentiels (-50 %) à des pays où la diaspora libanaise est fortement implantée comme le Brésil, les États-Unis ou l’Australie. « Si seulement 10 % de nos expatriés rentraient une fois par an au Liban, cela permettrait à la roue économique de redémarrer, explique-t-il. Il faut compter sur les Libanais de la diaspora plutôt que sur les touristes arabes. » Deuxième élément de réponse soulevé par le président du RDCL : le soutien aux microentreprises et PME. « En période de crise, ce ne sont pas les grandes entreprises qui vont investir et employer mais plutôt les très petites structures qu’il faut aider à se développer. » Sur la question de l’électricité, face à l’incompétence de l’État, Fouad Zmokhol propose de réorganiser les moteurs de quartiers afin de revoir les coûts, les taxes et les gains que l’État pourrait en tirer. Enfin, une dernière solution évoquée par le chef du RDCL pour redynamiser l’économie serait d’attirer les investisseurs syriens au Liban, en leur proposant des accords préférentiels dans des régions libanaises en marge du développement. Le forum se poursuit aujourd’hui avec notamment un dialogue ouvert en présence entre autres du gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, sur la situation financière et monétaire au Liban.


 

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