Abattu par une hache dans son village natal de Chbaniyé le 2 avril 1976, Kamal el-Hage était chef du département de philosophie à la Faculté des lettres de l’Université libanaise. Bergsonien de formation, philosophe engagé et grand défenseur de la formule consensuelle libanaise et de l’idée de la rencontre islamo-chrétienne comme exprimant l’être libanais – la naslamiyya –,
Hage a mené combat durant toute sa carrière académique, avec succès, pour inclure la « philosophie libanaise » comme discipline au programme de la faculté. Auteur notamment, entre plusieurs essais philosophiques, d’un extraordinaire et volumineux Précis de philosophie libanaise peu avant son assassinat, ce professeur avait annoncé dans cet ouvrage rédigé à la hâte, dans l’inquiétude des menaces pressantes et de plus en plus nombreuses, la fondation du « nationalisme libanais », dans la lignée du nationalisme pan-syrien d’Antoun Saadé et du nationalisme arabe d’Amine el-Rihani. Les auteurs de son assassinat n’ont jamais été démasqués, mais la famille du disparu a toujours privilégié deux pistes plus ou moins convergentes : le régime de Kadhafi, que le philosophe avait sévèrement tancé à la suite de propos infamants contre le Liban, et le régime syrien… Comme Moussa Sadr, ironie du sort. Toujours est-il qu’à l’instar de Moustapha Geha, les ouvrages et la pensée de Kamal el-Hage vont, censure syrienne oblige, tomber dans l’oubli après 1990… Jusqu’à ce que son fils Youssef décide enfin de lancer, au lendemain du printemps de Beyrouth, un vaste chantier de réédition des œuvres du philosophe.
Il ya quelques jours un timbre a été émis pour commémorer son père le plus accompli de travail: « la Philosophie libanaise »