Par Claire WILLIOT | 15/08/2012
La directrice du Lebanese Emigration Research Center de Jounieh, Guita Hourani, dévoilera jeudi la réplique du Titanic, qui sera ensuite entreposée dans son musée.
HOMMAGE L’Union libanaise culturelle dans le monde (ULCM) a décidé de commémorer pour la première fois les Libanais décédés sur le Titanic. La cérémonie, inédite, se déroulera jeudi au musée du Lebanese Emigration Research Center de Jounieh.
Tout le monde connaît la tragique histoire du Titanic, paquebot devenu tristement célèbre à la suite de son naufrage dans les eaux glaciales de l’Atlantique le 15 avril 1912. Mais beaucoup ignorent peut-être qu’à son bord, parmi les 1 316 passagers, se trouvaient de nombreux Libanais. Les premières recherches, engagées au début de l’année sous l’initiative de Nicolas Kahwaji, membre de l’ULCM en Colombie-Britannique (Canada) et représentant de l’organisation aux Nations unies, en dénombrent 154. Seuls 29 survécurent. « Il n’était pas facile de retrouver la trace des Libanais, parfois indifféremment qualifiés de Turcs, Arabes ou Syriens. Sans compter les registres, où les noms étaient bien souvent mal orthographiés », constate Nicolas Kahwaji, avant d’ajouter : « Certains disent qu’ils étaient en réalité plus nombreux, mais la grande majorité des chercheurs s’accordent néanmoins sur ce nombre. »
Un compte difficile à établir, du fait que la 3e classe n’était pas toujours recensée. Or les Libanais présents à bord du Titanic faisaient majoritairement partie de cette classe de l’immigration, rigoureusement séparée des autres passagers. Les hommes, pour beaucoup chrétiens, fuyaient les persécutions et partaient s’installer aux États-Unis, avant de revenir chercher leur famille.
Une plaque et trois cèdres pour l’histoire
L’hommage rendu ce jeudi au Lebanese Emigration Research Center de Jounieh sera l’occasion de dévoiler une réplique du Titanic de 75 centimètres, ainsi qu’une plaque de commémoration sur laquelle figurent actuellement soixante noms, suivis de trois petits points… « Nous avons décidé de n’inscrire que les personnes pour lesquelles nous disposons de réelles informations, telles que le nom, le prénom, la ville d’origine », explique Nicolas Kahwaji. « Les autres noms y seront ajoutés au fur et à mesure. »
Cet événement, loin de signer l’aboutissement des recherches, se place bien au contraire comme étant le point de départ des opérations. Dans les mois à venir, trois cèdres du Liban devraient être apportés dans chacun des cimetières d’Halifax, capitale de la province canadienne de la Nouvelle-Écosse, où reposent de nombreuses victimes de la catastrophe. Enfin, le site Internet de l’ULCM devrait mettre prochainement en ligne « Titanic, l’histoire libanaise », un document regroupant toutes les histoires et références récoltées au cours des derniers mois.
Au Liban, beaucoup de familles ont vu au moins un de leurs proches quitter un jour le pays par bateau. Une des raisons pour laquelle Nicolas Kahwagi ne doute pas de l’engouement que devraient susciter ces recherches. Ce qui n’empêche pas l’homme d’afficher un certain pragmatisme : « Je sais que cela peut paraître étrange de célébrer quelque 125 personnes disparues il y a un siècle alors que des milliers sont décédées pendant la guerre. Mais je pense qu’il faut que le monde sache. »
« Des histoires qui donnent les larmes aux yeux »
À deux jours de la commémoration, Nicolas Kahwagi livre les premiers récits issus de ces mois de recherches : « Il y a des histoires qui donnent les larmes aux yeux et qui font mal au cœur. Beaucoup d’histoires d’héroïsme, de fierté, de cœur aussi. » Ainsi, des témoignages de survivants ont permis d’identifier des Libanais présents à différents moments de la catastrophe. Certains auraient été tués par balles, d’autres écrasés par les cheminées. Sur les 19 habitants du village de Hardine, seuls 7 survécurent, dont un seul homme, qui se cacha dans la robe d’une femme dans un canot de sauvetage. D’autres n’eurent pas cette chance. À l’image de Hanna Tannous Abou Chahine, venu chercher son enfant resté au Liban. Il tenta de le faire embarquer sur un canot, suppliant les officiers, leur proposant de payer le poids en or de son enfant. En vain. L’histoire dit qu’il l’enlaça jusqu’à ce que l’eau les engloutisse. L’émir Farès Chéhab confia quant à lui sa bague à une femme embarquée sur un canot avant le naufrage. Sa famille l’aurait reçue un peu plus tard. Certains disent que les habitants de Hardine restés sur le bateau dansèrent la dabké jusqu’au dernier moment. Quand l’eau commença à venir, ils se mirent à genou et prièrent.
« Il faut imaginer une tour de Babel, explique Nicolas Kahwaji. Plus de 1 000 personnes attendant une mort certaine, criant dans toutes les langues. » Même enfoui dans les profondeurs de l’océan, le Titanic n’a pas fini de faire parler de lui.
Un compte difficile à établir, du fait que la 3e classe n’était pas toujours recensée. Or les Libanais présents à bord du Titanic faisaient majoritairement partie de cette classe de l’immigration, rigoureusement séparée des autres passagers. Les hommes, pour beaucoup chrétiens, fuyaient les persécutions et partaient s’installer aux États-Unis, avant de revenir chercher leur famille.
Une plaque et trois cèdres pour l’histoire
L’hommage rendu ce jeudi au Lebanese Emigration Research Center de Jounieh sera l’occasion de dévoiler une réplique du Titanic de 75 centimètres, ainsi qu’une plaque de commémoration sur laquelle figurent actuellement soixante noms, suivis de trois petits points… « Nous avons décidé de n’inscrire que les personnes pour lesquelles nous disposons de réelles informations, telles que le nom, le prénom, la ville d’origine », explique Nicolas Kahwaji. « Les autres noms y seront ajoutés au fur et à mesure. »
Cet événement, loin de signer l’aboutissement des recherches, se place bien au contraire comme étant le point de départ des opérations. Dans les mois à venir, trois cèdres du Liban devraient être apportés dans chacun des cimetières d’Halifax, capitale de la province canadienne de la Nouvelle-Écosse, où reposent de nombreuses victimes de la catastrophe. Enfin, le site Internet de l’ULCM devrait mettre prochainement en ligne « Titanic, l’histoire libanaise », un document regroupant toutes les histoires et références récoltées au cours des derniers mois.
Au Liban, beaucoup de familles ont vu au moins un de leurs proches quitter un jour le pays par bateau. Une des raisons pour laquelle Nicolas Kahwagi ne doute pas de l’engouement que devraient susciter ces recherches. Ce qui n’empêche pas l’homme d’afficher un certain pragmatisme : « Je sais que cela peut paraître étrange de célébrer quelque 125 personnes disparues il y a un siècle alors que des milliers sont décédées pendant la guerre. Mais je pense qu’il faut que le monde sache. »
« Des histoires qui donnent les larmes aux yeux »
À deux jours de la commémoration, Nicolas Kahwagi livre les premiers récits issus de ces mois de recherches : « Il y a des histoires qui donnent les larmes aux yeux et qui font mal au cœur. Beaucoup d’histoires d’héroïsme, de fierté, de cœur aussi. » Ainsi, des témoignages de survivants ont permis d’identifier des Libanais présents à différents moments de la catastrophe. Certains auraient été tués par balles, d’autres écrasés par les cheminées. Sur les 19 habitants du village de Hardine, seuls 7 survécurent, dont un seul homme, qui se cacha dans la robe d’une femme dans un canot de sauvetage. D’autres n’eurent pas cette chance. À l’image de Hanna Tannous Abou Chahine, venu chercher son enfant resté au Liban. Il tenta de le faire embarquer sur un canot, suppliant les officiers, leur proposant de payer le poids en or de son enfant. En vain. L’histoire dit qu’il l’enlaça jusqu’à ce que l’eau les engloutisse. L’émir Farès Chéhab confia quant à lui sa bague à une femme embarquée sur un canot avant le naufrage. Sa famille l’aurait reçue un peu plus tard. Certains disent que les habitants de Hardine restés sur le bateau dansèrent la dabké jusqu’au dernier moment. Quand l’eau commença à venir, ils se mirent à genou et prièrent.
« Il faut imaginer une tour de Babel, explique Nicolas Kahwaji. Plus de 1 000 personnes attendant une mort certaine, criant dans toutes les langues. » Même enfoui dans les profondeurs de l’océan, le Titanic n’a pas fini de faire parler de lui.