« Les paramètres d’Hérodote » revisités par Bahjat Rizk






Friday, 22 May 2009

Par Colette KHALAF le 12/05/2009‎


Ce soir, 18 heures, à l’hôtel « Bristol », Bahjat E. Rizk signe son essai « Les Paramètres ‎d’Hérodote » (éditions « L’Orient-Le Jour »). Une approche ni morale ni politique, mais ‎anthropologique de ces identités culturelles collectives.‎





Avocat, essayiste, professeur universitaire et attaché culturel depuis dix-neuf ans près la ‎délégation libanaise de l’Unesco (Paris), Bahjat Rizk fonde son essai sur des recherches et des ‎ouvrages de références anthropologiques, entre autres L’enquête d’Hérodote, Race et histoire de ‎Claude Lévi-Strauss, ainsi que Identité culturelle et De l’identité et du sens de Sélim Abou. Le ‎cheminement de la pensée de l’auteur s’est articulé sur deux discours parallèles. «À partir de la ‎réalité libanaise dont je suis issu et qui m’habite, je me suis lancé vers une dimension plus ‎universelle.» Le résultat est donc un croisement entre la préoccupation identitaire au Liban et un ‎travail plus collectif. «Il fallait établir cette grille paramétrique et faire une compensation entre ‎ces éléments qui peuvent être source d’enrichissement ou de conflits, ajoute-t-il, et présenter ‎une idée cohérente et rationnelle sans qu’elle ne soit récupérée par le politique.»  
Les Paramètres d’Hérodote propose donc d’identifier et de reconnaître ces paramètres pour ‎mieux comprendre les bouleversements sociaux « dans une même logique qui vise à les ‎juxtaposer, les superposer, les additionner, les soustraire et les relativiser ». Si, dans une ‎première partie, l’auteur prendra le soin de développer ces supports d’identité qui sont la religion, ‎la langue, les mœurs et la race, la seconde partie est réservée à une vingtaine d’articles publiés ‎autour du même thème dans L’Orient-Le jour entre 2000 et 2008. ‎


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‎« Hérodote, qualifié de père de l’histoire par Cicéron et reconnu comme le père de l’histoire ‎mondiale et occidentale, nous donne, il y a 2 500 ans, la première définition de la nation et nous ‎fournit par la même occasion les paramètres de structuration identitaire collective culturelle. À ‎Xerxès, roi des Perses qui s’apprête à envahir la Grèce, les exilés grecs répondent que les Grecs ‎sont séparés par des villes et se battent entre eux, mais dès que quelqu’un de l’extérieur arrive, ‎ils ne forment plus qu’un seul corps, à cause de ce qu’on traduira plus tard par : « même sang, ‎mêmes mœurs, même langue et même religion». Cet extrait de l’entretien avec Hélène Ahrweiler ‎‎(L’Express 12/7/2004), rapporté en avant-propos de l’ouvrage, illustre le but de cet essai qui est ‎d’« identifier ces paramètres et de les lier les uns aux autres, car ils expliquent et résument la ‎plupart des conflits culturels identitaires ».  
L’auteur précise plus loin : «Le but n’est pas de créer une discrimination, mais de reconnaître les ‎différences structurales pour pouvoir les dépasser.» Et d’appuyer sa théorie cognitive par une ‎citation de la charte constitutive de l’Unesco, qui stipule au début de son article 1er: «Afin ‎d’assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l’homme et des libertés ‎fondamentales pour tous sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion…» Vingt-cinq ‎siècles plus tard, ce sont donc les mêmes catégories qui règlent non seulement la marche de la ‎nation, mais celle de l’univers.  
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Enclencher le débat 
Dans sa préface, Sélim Abou s.j. s’attarde sur la mondialisation, principale source de ‎changements radicaux responsables : « La mondialisation, dit-il, qui se traduit actuellement par ‎l’ouverture des frontières, la libre circulation des hommes, des biens et des capitaux, ‎s’accompagne de l’idéologie de la culture globale qui vise à la réduction des différences ‎culturelles. Les revendications identitaires telles qu’elles se manifestent aujourd’hui semblent être ‎une réaction aux effets perturbateurs de cette mondialisation. C’est dans cette dynamique que se ‎situe Bahjat Rizk, poursuit-il, pour étudier les métamorphoses des identités culturelles ‎collectives.» «L’identité n’est pas un état, mais un processus, souligne encore Abou. C’est une ‎donnée historique qui se construit et se déconstruit au gré des circonstances politiques, ‎économiques et sociales. C’est ainsi que des glissements et des déplacements s’opèrent d’un ‎paramètre à un autre en fonction des situations.» 
‎«Peut-on faire coexister toutes ces cultures avec leurs différents paramètres? Comment pouvoir ‎éviter les conflits identitaires culturels? La nation est-elle un bienfait ou un désastre?» Autant ‎d’interrogations auxquelles l’essayiste apporte un éclairage simple, fondé sur les expériences de ‎différents pays, comme la Belgique, les États-Unis, le Canada et surtout le Liban.  
À travers cet essai qui tente de relier dans le temps Hérodote à l’Unesco, en passant par ‎Huntington (le père de la théorie du choc des civilisations), l’auteur soulève le débat et attend ‎une solution «qui ne viendra qu’après une certaine maturité et rationalité de la réflexion, or le ‎Liban, vu ses traumatismes et ses chocs, ne travaille que dans  
l’immédiateté». 
Si Les Paramètres d’Hérodote est un pavé dans la mare, Bahjat Rizk a grande confiance qu’il fera ‎néanmoins des ronds dans l’eau. ‎

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